J’ai fait de mon mieux mais ma fille adulte me reproche tous ses problèmes tandis que je ne pense pas être une mauvaise mère

Éducation
Il y a 1 an

Les parents ont beau essayer d’être parfaits, les enfants ont toujours quelque chose à dire à leur thérapeute. Je pensais avoir investi toute mon âme dans ma fille mais elle a grandi et m’accuse maintenant de tous ses problèmes.

Ma fille unique Irène a 33 ans et vit seule. Il y a environ un an, elle a commencé à voir un psychothérapeute, et c’est parti : “Maman, tu te souviens que tu ne m’as pas acheté de poupée quand j’avais cinq ans ? Tu as dit que tu n’avais pas d’argent et puis tu as ramené un grand pot d’œufs de saumon à la maison. Et depuis, je les déteste !”. Ou encore : “J’ai toujours voulu être une danseuse de ballet, mais tu m’as inscrite dans un cours de danse folklorique. Tu ne m’as jamais écoutée !”

Ces offenses de la part de ma fille sont sans fin. Elle me reproche d’avoir grandi sans père, et maintenant elle ne peut pas construire des relations stables. J’ai également forcé ma fille à laver les sols et la vaisselle, ce qui a brisé sa volonté, et maintenant tout le monde profite de sa gentillesse. Je l’ai inscrite dans la mauvaise école, au mauvais bord de mer, je l’ai peu encouragée : en gros, je n’ai jamais été une mère, mais plutôt un monstre.

Au début, je me suis excusée de m’être peut-être comportée de manière inappropriée. Vous savez, nous n’étions pas formés à la psychologie de l’enfant. Puis j’en ai eu assez de m’excuser de ne pas être à la hauteur de l’image qu’elle se faisait d’une bonne mère. Je n’ai pas vraiment cherché à atteindre l’idéal : je me suis débrouillée comme j’ai pu, sans l’aide des grands-parents et, depuis les un an de ma fille, même sans mari. Et d’ailleurs, même sans couches et sans machine à laver.

Oui, Irène est allée très tôt à la crèche, mais j’étais toujours là : je travaillais comme femme de ménage à la crèche, et la nuit, je cousais sur commande. Je ne m’entendais pas avec son père, c’est vrai. J’avais 20 ans, je n’avais aucune expérience de la vie. D’un autre côté, que pouvais-je faire lorsque mon mari est venu me dire qu’il en aimait une autre, et qu’après le divorce, il a même déménagé avec une nouvelle petite amie à 4000 kilomètres de chez nous ?

Je voulais que ma fille grandisse dans une famille complète. Mais lorsque, trois ou quatre ans après le divorce, j’ai emmené un homme à la maison pour le présenter à ma fille, Irène s’est accrochée à ma jambe et a crié : “Va-t’en, va-t’en ! Ma mère est à moi !” Puis elle a pris ses chaussures et les a jetées dans les toilettes. Elle faisait de telles crises de colère, c’était horrible ! J’ai décidé de ne pas traumatiser ma fille avec un nouveau “papa”. Quand Irène avait 12 ans, j’ai repensé au mariage, je voyais un homme bien, mais ma fille ne l’a pas accepté non plus. Elle m’a dit : “Si tu ramènes quelqu’un à la maison, je vais m’enfuir.” J’ai eu peur, alors je ne l’ai pas fait.

Irène a raison à propos de la poupée : je ne l’ai pas achetée. C’était une époque où nous avions du mal à joindre les deux bouts, et la couture était la seule chose qui nous sauvait. Mais le plus souvent, les clients ne payaient pas avec de l’argent : les uns donnaient des œufs, d’autres du lait frais, mais la femme d’un marin a payé trois robes de soirée avec un grand pot d’œufs de saumon.

Pensez-vous que c’était parce que j’en avais envie ? Non. C’est juste que ma fille tombait souvent malade et que le médecin lui a recommandé des fruits de mer : pour l’hémoglobine et l’immunité. Je me souviens que je lui préparais un toast et qu’elle refusait de le manger.

C’est vrai que je ne l’ai pas inscrite au cours de danse classique, car il n’y a jamais eu d’école de ballet dans notre ville. Mais il y avait une association de danse folklorique qui n’était pas mauvaise : Irène a parcouru toutes les villes de la région avec eux et s’est même produite lors d’un festival dans la capitale. Et c’est aussi vrai que nous ne sommes allées à la mer qu’une seule fois : moi aussi, je l’ai vue alors pour la première fois. Bref, toutes les affirmations de ma fille sont vraies mais il y a toujours un “mais”.

J’ai fait de mon mieux pour que la vie d’Irène soit plus heureuse que la mienne. Dans mon enfance rurale, il n’y avait pas de cours de danse, pas de vacances à la mer : il y avait une cour pleine de bétail, dont il fallait s’occuper, et trois frères plus jeunes. Je rêvais de devenir enseignante mais je n’y suis pas parvenue, j’ai suivi donc des cours de couture. J’ai payé des études de droit pour ma fille mais elle n’a même pas travaillé en tant qu’avocat : elle cherche encore sa voie. Est-ce que j’ai encore fait quelque chose de mal dans l’enfance de ma fille, qu’elle n’arrive toujours pas à se décider pour un métier ? Je n’en sais rien.

Je pense que la principale chose dont je suis coupable devant ma fille est de l’avoir trop aimée. Elle a toujours été pour moi “mon rayon de soleil” et “mon bonheur”. Mais j’aurais sans doute dû penser davantage à moi et organiser ma vie personnelle, malgré ses colères. Un enfant ne devrait pas avoir à décider de ces choses. Peut-être qu’avec un beau-père, des frères ou des sœurs, Irène aurait grandi plus heureuse et avec moins de reproches. Ou peut-être que ce serait l’inverse.

Mais il y a beaucoup de gens comme elle aujourd’hui. Des adultes qui ressassent leurs blessures d’enfance, cherchent des traumatismes et accusent papa et maman de tous les maux. Il est grand temps pour eux d’arrêter de regarder en arrière et d’y chercher des failles, il faut aller de l’avant et construire quelque chose de leur côté. Mais non, faire quelque chose soi-même, c’est effrayant, c’est plus facile de pleurnicher auprès du thérapeute sur le fait que leurs parents ne les ont pas aimés. Et il y a des millions d’histoires comme celle-là :

  • Mon fils a 39 ans. Il a consulté un psychologue qui lui a dit que ses problèmes étaient dus à ses parents, ou plutôt à tous les problèmes de la vie depuis l’enfance. Mon fils m’a dit un tas de mots grossiers et désagréables à propos d’une mauvaise éducation. J’ai été choquée. Je me suis toujours considérée comme une bonne mère, je ne me suis jamais mêlée de sa vie privée, je l’ai soutenu dans les moments difficiles. Notre relation avec lui était excellente, il était toujours attentif, gentil, attentionné. Aujourd’hui, il m’appelle comme si de rien n’était, et je réponds sèchement et avec retenue. Je suis vexée. Notre relation ne sera plus comme avant. Merci au psychologue. © ольга зубенко / Dzen
  • Une histoire identique. Ma fille de 35 ans, une femme établie et fortunée, a décidé de succomber à la frénésie générale et de commencer à consulter un psychologue. Le résultat est déplorable. Où est passée notre belle, franche et étroite relation, que nous avons eu pendant 33 ans : un mystère. Avec les mots “Et qu’as-tu fait pour moi ?”, elle a disparu de ma vie, rejetant la faute sur tout le monde. Au début, j’étais très inquiète mais maintenant je me dis : c’est sa vie, qu’elle fasse ce qu’elle veut ! Olga Solovyova / Dzen
  • J’ai élevé ma fille seule, car mon mari est mort lorsqu’elle avait quatre ans. Je ne me suis pas remariée : je ne voulais pas amener un beau-père à la maison. J’ai eu plusieurs emplois en essayant de parvenir à nos besoins. J’ai renoncé à moi-même : juste pour que tout aille bien pour elle. J’ai payé ses études mais un jour, j’ai eu son retour. Ma fille m’a reproché tous ses échecs. Mais j’ai eu une brève conversation et je l’ai rapidement remise à sa place. Je lui ai rappelé que j’avais rempli mes devoirs parentaux, et que je la laissais maintenant les remplir devant ses enfants. Si j’ai été une mauvaise mère, qu’elle soit une meilleure mère pour eux. Moi seule, sans mari, j’ai pu lui donner une bonne éducation, elle n’a jamais travaillé ni pendant les vacances ni le soir, je n’ai pas fait entrer un inconnu dans la maison, elle n’était pas plus mal habillée que ceux qui avaient un père, et même mieux. Et maintenant je suis libre. Ma fille ne se permet plus de telles crises. Et vous aussi, commencez à vivre votre vie, et votre fille viendra toujours vers vous, n’en doutez pas. © Ludmila Stepanova / Dzen

Je n’ai que 50 ans et quelques. J’ai créé mon propre petit atelier, j’ai une bonne clientèle. Je ne suis pas prête à passer le reste de ma vie à m’excuser devant ma fille parce que je n’ai pas pu la rendre heureuse, parce que nous n’avions pas d’appartement dans le centre et de voiture branchée, parce qu’elle a étudié dans une université ordinaire et non à Cambridge, parce qu’elle n’a pas passé ses vacances à Bali ou aux Maldives. Je pense avoir fait de mon mieux, et je la laisse maintenant essayer de faire quelque chose elle-même : 33 ans est un âge idéal pour cela.

À l’âge adulte, de nombreuses personnes se souviennent de leurs rancunes d’enfance comme si elles s’étaient produites hier. Bien sûr, il arrive que les adultes ne soient pas très gentils avec nous dans notre enfance mais ce n’est probablement pas la seule chose qui a causé des problèmes et des échecs dans la vie d’une personne.

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