“Ne t’a-t-on pas appris à partager ?” Voilà pourquoi il n’est pas si mal d’être un peu radin

Éducation
Il y a 2 ans

Faut-il apprendre à son enfant à partager ? À un moment donné, tous les parents se posent cette question. D’une part, personne ne veut que son enfant soit radin, mais d’autre part, cela nous fait du mal de voir notre petit pleurer quand on le prive de son jouet préféré. Dans une situation de conflit, chaque parent agit comme il le sent.

Beaucoup d’entre nous ont grandi à l’époque où il était normal de tout partager avec les autres. Tout était simple et clair : si tu as apporté des bonbons, il fallait les partager entre les copains, si on t’a offert un vélo, tu devais laisser les autres faire un tour et si tu es venu à l’école avec des feutres, tous les enfants de ta classe pouvaient dessiner avec.

Personne ne s’entendait avec les radins. Comme avec ce garçon qui ne nous prêtait pas son jeu Tetris. Du coup, il restait tout seul sur un banc avec sa console pendant que nous jouions à cache-cache.

galitskaya / Depositphotos

Tout ce qu’un enfant apportait avec lui, était considéré comme “commun” : ce n’était pas sympa de jouer tout seul. Je respectais toujours cette règle tacite et je pensais donc que j’étais très généreuse. Jusqu’à ce qu’une situation se produise.

Un jour, ma tante est venue chez nous avec sa fille. J’avais sept ans et Lise en avait cinq. Elle a tout de suite remarqué ma poupée préférée — la mariée en robe blanche avec un voile — et elle a voulu jouer avec. À contrecœur, j’ai laissé ma cousine jouer avec ma poupée. Quand les invités se préparaient à partir, Lise a serré la mariée contre elle et a crié : “Elle est à moi !” Je voulais récupérer mon jouet, mais ma mère m’a retenue en disant à ma cousine : “Tu peux l’avoir. Marie est déjà grande, elle n’en a plus besoin”. Oh, comme j’ai sangloté ! Mais au lieu de me consoler, ma mère m’a dit avec mépris : “Je ne pensais pas que ma fille était si égoïste !”

Je me souviens de cette poupée depuis plus de 30 ans et je me sens mal pour la petite fille que j’étais. Maintenant, je suis maman et je ne peux même pas m’imaginer donner le jouet préféré de mon enfant à quelqu’un d’autre. Avant, c’était une situation assez courante et même aujourd’hui certains parents n’y voient rien de mal. La preuve en sont les histoires des internautes.

  • Ma fille était dans un parc avec sa grand-mère, elle avait une poupée avec elle. Une petite a voulu jouer avec la poupée de ma fille qui ne voulait pas la prêter. Alors, sa mamie lui a pris la poupée et l’a donnée à l’autre fille. La gamine y a joué un peu, a retiré ses vêtements et l’a laissée sur un banc. En conséquence, une petite chaussure a été perdue, ma fille était en larmes tandis que l’enfant que nous ne connaissions même pas était contente. © DeviMC / Pikabu
  • Plein de mes affaires ont été abimées parce que je “devais partager”. Quand j’avais neuf ans, j’avais des raquettes de tennis en bois. La première fille à qui je les ai prêtées, les a cassées. Elle m’en a acheté une autre paire de mauvaise qualité que j’ai jetée tandis qu’elle a réparé mes raquettes et a continué à s’en servir. Quinze ans sont passés depuis cette histoire, mais je me souviens encore de ce ressentiment. Ma mère m’a grondée en plus parce que je pleurais “pour rien”. © banka.varenya / Pikabu
  • Je me souviens bien comment ma grand-mère m’a appris à partager, à ne pas être égoïste. En conséquence, je ne peux pas défendre mes intérêts, ni accepter de cadeaux. J’ai toujours l’impression que je dois offrir quelque chose en retour, quelque chose d’encore plus important : pour le cadeau et pour l’attention ! © jknastasi / Pikabu

Quand mon fils était petit, on avait toujours un tas de jouets sur nous, pour qu’il ne s’ennuie pas. Au début, il ne voulait rien partager et j’essayais de le convaincre en disant : “Tu pourrais prêter ta voiture à Nathalie, tu vois bien qu’elle pleure !” ou “Laisse Adrien jouer avec ton ballon, il est plus petit que toi”. Mon fils se fâchait et j’avais honte de lui. Et puis je me suis demandé : mais pourquoi l’enfant devrait-il prêter ses affaires à quelqu’un seulement parce qu’on lui a demandé de le faire ? Les adultes ne font pas ça !

Plus tard, mon enfant a commencé à s’intéresser aux jouets des autres et je lui ai appris à échanger. Tu voudrais jouer avec le train de ce garçon ? Propose-lui ton quatre-quatre. A-t-il accepté ? Super ! Il ne veut pas échanger ? Tant pis, il a le droit de refuser, tu n’as qu’à jouer avec tes propres jouets. Il a assez vite appris à accepter le refus. Vers deux-trois ans il savait bien qu’il ne pouvait pas prendre les affaires des autres sans autorisation et que le meilleur moyen d’obtenir un jouet de quelqu’un était de lui proposer un échange.

Ce principe me semblait parfait, mais il ne m’a quand même pas aidée à éviter les conflits. Malheureusement, certains parents n’expliquent même pas à leurs enfants qu’avant de prendre les affaires des autres, il faut demander l’autorisation et savoir accepter le refus. Ils sont persuadés que leur enfant est le plus important du monde et les autres doivent lui donner tout ce qu’il veut avoir.

Un jour, quand mon fils avait trois ans, nous sommes venus sur une aire de jeux et avons apporté tout un sac de jouets que nous avons mis sur un banc. Louis faisait du toboggan quand il a vu un autre garçon jouer avec son tracteur. Il a couru le récupérer, mais le garçon ne voulait pas le rendre. Sa mère repoussait mon fils, en plus. J’ai dû intervenir en disant : “Pouvez-vous rendre notre jouet, s’il vous plaît ?” Mais cette dame m’a répondu sans gêne : “Mais mon fils voulait jouer avec ! Ne vous a-t-on pas appris à partager ?”

Il paraît que fouiller dans les affaires des autres était normal pour elle. Du coup, l’éducation des enfants devrait commencer par l’éducation de leurs parents.

Aujourd’hui, on parle de plus en plus du fait qu’il est important de considérer l’opinion de l’enfant et de ne pas violer ses limites. C’est bien, mais il y a des nuances.

Un jour, une amie de mon fils l’a invité pour son anniversaire. Marine a eu six ans et ses parents ont invité une animatrice. D’abord, Marine n’était pas contente parce que l’animatrice habillée en princesse jouait avec tous les enfants et pas uniquement avec elle. Ensuite, quand ses parents ont sorti un grand gâteau en forme de licorne, elle a crié : “Il est à moi toute seule ! Je vous interdis de le couper !” Les parents n’ont fait que hausser les épaules comme s’ils disaient : “Nous n’y sommes pour rien”. Les invités sont partis sans avoir goûté au gâteau d’anniversaire.

D’une part, les parents de Marine ont raison, car ils ne forcent pas leur fille à partager si elle n’en a pas envie. Mais d’autre part, quand on invite ses amis, on doit les traiter avec du respect. Cette expérience m’a fait comprendre qu’il faut toujours savoir trouver le juste milieu.

Voici donc ce que je dis à mon fils : “Tu n’es pas obligé de partager tes affaires. Si tu n’en as pas envie, tu peux simplement dire ’non’. Mais sache que dans ce cas, les autres ne voudront pas partager leurs affaires avec toi, car ils ne sont pas obligés, non plus”. Il a huit ans et ça marche pour l’instant. On verra bien ce que cela donnera plus tard.

Apprends-tu à tes enfants à partager ou penses-tu que ce n’est pas utile dans le monde d’aujourd’hui ?

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