Pourquoi les Grands Fonds Marins Engendrent-ils des Géants ?

Animaux
Il y a 1 an

La majeure partie de l’océan est encore entourée de mystère, qu’il s’agisse de coins sombres ou de créatures qui se cachent dans les abysses. Mais parfois, il nous donne un aperçu des choses effrayantes qu’il abrite dans ses profondeurs froides et obscures. Par exemple, lorsque tu entends aux nouvelles que des créatures des profondeurs se sont échouées sur le rivage après la dernière tempête... Certaines ont juste l’air bizarre, tandis que d’autres sont de véritables monstres d’épouvante qui vivent à plus de 1 000 mètres de profondeur.

Les parties les plus froides et les plus profondes de l’océan ont engendré un phénomène spécifique que l’on nomme “gigantisme”. Ainsi, les araignées de mer, les calmars, les vers et de nombreux autres animaux — principalement des invertébrés, c’est-à-dire des créatures dépourvues de colonne vertébrale — sont tous beaucoup plus gros et effrayants que les versions que nous observons dans les zones moins profondes. Dans les profondeurs du Pacifique, on peut trouver une éponge de mer aussi grande qu’un monospace ! Ou encore le Mesonychoteuthis hamilton, ou calmar colossal, qui vit dans les eaux subantarctiques et qui est près de 14 fois plus long que l’encornet minami (ou Nototodarus sloanii), un type de calmar qui vit principalement au large de la Nouvelle-Zélande.

Les chercheurs ont trouvé quantité de ces monstres sous-marins dans la zone abyssale de l’océan (entre 4 000 et 6 000 mètres de profondeur). En 2021, les chercheurs sont parvenus à ramener des images de la méduse fantôme géante. Elle se trouvait à une profondeur de 1 000 mètres et ses tentacules s’étendaient sur 10 mètres de long. Je n’aimerais pas tomber là-dessus à la plage... Elle ne se nourrit probablement que de petits poissons et de plancton. Mais elle peut nager jusqu’à des profondeurs de plus de 6 500 mètres. Et là-bas, cette méduse géante ne trouve pas assez de nourriture. Comment survit-elle alors ? Les scientifiques n’ont pas encore trouvé la réponse à cette question.

Et il y a encore davantage d’interrogations au sujet du calmar géant, le plus grand membre de son espèce jamais découvert. Ce monstre mesure 13 mètres de long et pèse près d’une tonne. Imagine que ses tentacules se saisissent de ta voiture ou de tout objet de ce genre, ils l’écraseraient comme s’il s’agissait d’un jouet ! Il n’y a pas la moindre lumière dans les abysses, car les rayons du soleil ne peuvent pas pénétrer aussi profondément. Il ne s’y trouve donc pas d’algues ni de plantes sous-marines. La faune locale se nourrit donc principalement de neige... La neige marine n’est pas comme celle que l’on utilise pour faire des bonshommes de neige. Il s’agit de tous les petits débris ou détritus qui pleuvent de la surface de l’océan, peut-être même des restes que les prédateurs n’ont pas pu terminer là-haut. Ce n’est donc pas grand-chose. Mais apparemment, cela suffit aux créatures qui se cachent dans les profondeurs, comme les calmars géants.

Les calmars qui vivent en général à de telles profondeurs ne se donnent pas la peine d’aller chercher leurs proies. Ils attendent simplement que le pauvre animal nage jusqu’à leurs longs tentacules et tombe dans le panneau. Ce n’est peut-être pas la technique la plus efficace, car peu d’animaux se risquent à nager dans ces zones sombres et froides. Mais cette méthode permet d’économiser de l’énergie. Un calmar géant n’ingère qu’environ 30 grammes de poisson par jour, ce qui représente environ 45 calories. C’est près de 50 fois moins de calories que ce qu’une personne moyenne devrait consommer par jour. Ainsi, lorsqu’un calmar prend un poisson, il le garde pour quelques jours.

On espère que les calmars géants n’auront pas l’idée de remonter à la surface pour chercher de la nourriture quand il n’y en aura plus assez dans les abysses... Et on souhaite ardemment que les requins géants du Groenland, encore plus nombreux, n’auront pas la même idée. On les trouve à des profondeurs allant jusqu’à 2 200 mètres. Ils nagent trois fois plus lentement que nous ne nous déplaçons à pieds — soit une vitesse d’1,2 km/h. Cette lenteur fait partie du mécanisme d’économie d’énergie dont les créatures des profondeurs ont besoin pour survivre. Mais ces requins peuvent effectuer de courtes pointes de vitesse lorsqu’ils cherchent à attraper une proie. Toutefois, ils ont en quelque sorte changé de régime alimentaire, passant de prédateur à charognard, compte tenu de leur environnement — car il y aura toujours plus de restes tombant de la surface que d’animaux à chasser.

Les requins du Groenland ne grandissent que d’un centimètre par an. Et un individu moyen mesure en général 6,50 mètres de long, ce qui signifie qu’ils vivent extrêmement longtemps, parfois jusqu’à 400 ans. Ils ont également un métabolisme très lent, ce qui est l’un des principaux facteurs de leur longévité. Les requins du Groenland aiment passer du temps dans les eaux froides. Ils y sont adaptés, car leurs tissus contiennent des composés chimiques spécifiques qui empêchent la formation de cristaux de glace sur l’ensemble de leur corps. Cela signifie qu’ils disposent d’une sorte d’antigel naturel.

Qu’est-ce qui les rend si grands ? Les scientifiques n’en sont toujours pas certains, mais certaines théories tentent de l’expliquer. Selon la loi de Kleiber, les animaux plus gros ont tendance à être les plus efficaces. Il suffit de comparer un petit poisson à une baleine, dont la masse est des centaines de fois supérieure. La baleine a un bien meilleur métabolisme. Elle conserve l’énergie plus efficacement et en disperse moins dans l’environnement sous forme de chaleur. Les animaux plus gros peuvent ingérer des proies plus grosses. Ils sont plus à même de faire face à des problèmes difficiles dans leur environnement ou de se défendre contre les prédateurs qui s’en prennent à eux. En outre, le corps grossit lorsque les températures sont plus basses. Le requin du Groenland en est un parfait exemple, tout comme les araignées de mer géantes.

Les araignées de mer sont assez communes, et on en trouve de très petites, d’une taille d’un millimètre même. Mais dans les zones les plus profondes de l’Antarctique, elles deviennent des géantes d’un mètre de long. Si elles deviennent si grandes, c’est parce que l’eau froide contient plus d’oxygène. L’oxygène se diffuse donc davantage dans le corps de l’animal, ce qui lui permet de grandir — oui, à la fois comme organisme et comme créature de cauchemar. — Et que dire de ce ver tubicole géant : le Riftia pachyptila ? Des chercheurs l’ont découvert accidentellement alors qu’ils sondaient les mystères du fond de l’océan Pacifique. Ils sont tombés sur des cheminées hydrothermales inhabituelles. C’est la chaleur volcanique qui est à l’origine de celles-ci. Lorsque l’eau s’infiltre par des failles ou des fissures dans la roche, ces évents changent de direction. Et lorsque l’eau en ressort, elle est riche en minéraux et en composés chimiques. La plupart des animaux ne pourraient jamais survivre à cette soupe toxique, mais pas ces vers tubicoles.

Cela a été une véritable surprise, car non seulement ils ne sont pas gênés par ces cheminées toxiques et par la température presque bouillante de l’eau, mais ils y ont développé des écosystèmes entiers. Ils sont uniques parce qu’ils n’ont pas besoin de la lumière du soleil pour survivre. Au lieu de cela, de petites bactéries constituent leur principale source d’énergie. Ces bactéries tirent leur énergie directement de ces composés chimiques toxiques. Il ne s’agit donc pas de photosynthèse, mais d’un processus appelé chimiosynthèse. Et ces vers tubicoles n’ont pas de bouche — les bactéries vivent à l’intérieur d’eux. Drôle d’histoire, n’est-ce pas ? De plus, ces vers effrayants peuvent atteindre jusqu’à 2,40 mètres.

— Les bathynomus, ou isopodes géants, ne sont pas mieux lotis non plus. Ils se cachent dans les profondeurs de l’océan, à 500 mètres ou davantage, loin de la lumière du soleil, et ressemblent à de monstrueux cloportes. Ils passent la plupart de leur temps sur le plancher océanique, espérant récupérer de la nourriture qui tombe des strates supérieures de l’océan.
Regarde ces petites griffes crochues à l’extrémité de leurs pattes. Ces isopodes s’en servent pour demeurer stables lorsqu’ils se déplacent sur le fond de l’océan.

Comme il n’y a pas de lumière, ils disposent de longues antennes qui leur permettent de se repérer. Ces antennes sensorielles mesurent environ la moitié de la longueur de leur corps et les bathynomus ont également des yeux assez grands en proportion. Ces isopodes peuvent mesurer plus de 30 cm de la tête à la queue. Ce sont des animaux très patients. Tu te souviens qu’on a dit que les créatures des profondeurs trouvaient rarement de la nourriture ? Parfois, ceux-ci doivent attendre des années avant d’obtenir un vrai repas. C’est pourquoi leur métabolisme est incroyablement lent. Ils peuvent passer cinq ans sans rien manger. Imagine un peu... J’ai faim rien que d’en parler.

— En 2006, un biologiste du nom de Craig McClain a effectué des recherches visant à observer les différences entre les abysses et les régions peu profondes de l’océan. Il s’est rendu compte que les grands fonds reflétaient la “loi de Foster”. Tout d’abord, les parties les plus isolées du globe développent une biodiversité que l’on ne trouve nulle part ailleurs. Deuxièmement, les petits organismes se développent beaucoup plus lorsqu’ils sont isolés que la vie sur les grandes étendues terrestres. Les ressources sont limitées, mais aussi la concurrence et les prédateurs. Et nous ignorons encore beaucoup de choses au sujet de ces créatures des profondeurs... Il est trop coûteux et trop compliqué de mener de telles recherches. Nous attendrons donc que d’autres tempêtes déchaînées nous montrent au moins une partie du monde monstrueux que cachent les profondeurs glacées des océans.

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